Une étude japonaise publiée en 2023 dans le journal Science Translational Medecine a mis en évidence la présence d’une bactérie, le Fusobacterium nucleatum, chez 64% des femmes atteintes d’endométriose. Celle-ci pourrait être l’une des causes de l’endométriose ou un facteur aggravant.
Pourrait-il s’agir d’une nouvelle piste de traitement de l’endométriose par antibiothérapie ?
Quelle est cette bactérie ?
La bactérie Fusobacterium nucleatum est une bactérie que l’on trouve dans la flore buccale mais aussi dans le microbiote intestinal, mais en quantité moindre. Elle est naturellement présente à leur niveau mais peu devenir pathogène en cas de dysbiose.
Comment expliquer alors son passage dans les voies génitales ? Comment se retrouve-t-elle dans les tissus lésés par l’endométriose ?
La dysbiose intestinale augmente la perméabilité intestinale ce qui va fragiliser la barrière intestinale et permettre le passage dans la circulation sanguine de molécules, de bactéries… L’équipe de chercheurs japonais a pu prouver que cette bactérie, injectée dans le sang de souris, se retrouvait dans leur utérus.
Quel lien avec l’inflammation chronique et la migration de l’endomètre ?
Cette bactérie contient de nombreux lipopolysaccharides ou LPS dans sa membrane. Son passage dans la circulation sanguine va provoquer une inflammation, inflammation qui correspond à la réponse du système immunitaire face à cet agent pathogène. Nous comprenons donc que sa présence dans l’utérus va être à l’origine de réactions inflammatoires.
L’équipe japonaise a par ailleurs montré, par une analyse génétique, qu’un gène était surexprimé dans les tissus lésés. Celui-ci intervient notamment dans la prolifération et la migration cellulaires. Hors, il est aussi activé par l’inflammation.
D’où l’hypothèse de travail de ces chercheurs : agir sur la bactérie pour réduire voire supprimer l’inflammation et pour désactiver le gène. Ils s’orientent alors l’antibiothérapie pour y parvenir.
Ces scientifiques ont donc poursuivi leurs tests en administrant un antibiotique particulier aux souris et ont pu constater une réduction des lésions.
Des questions restent cependant en suspens.
Ces résultats obtenus chez l’animal vont-ils se retrouver chez les femmes atteintes d’endométriose et présentant le Fusobacterium nucleatum?
En effet, ces tests sur des souris ne suffisent pas pour conclure. D’autres études seront nécessaires, notamment des études cliniques chez l’homme. Une étude vient d’être au Japon, il nous faut maintenant attendre leurs conclusions.
N’oublions pas, aussi, que l’endométriose est une maladie multifactorielle et qu’elle est très hétérogène aux niveaux des lésions. La piste d’une antibiothérapie est donc une piste parmi d’autres mais certainement pas la seule
Ces études montrent, encore une fois, l’importance des microbiotes pour notre santé. Une piste prometteuse donc dans le traitement de l’endométriose.
Sources
Muraoka A, Suzuki M, Hamaguchi T et al. Fusobacterium infection facilitates the development of endometriosis through the phenotypic transition of endometrial fibroblasts. Sci Transl Med. 2023 Jun 14;15(700):eadd1531.
Fondation Endométriose, vers une nouvelle approche thérapeutique de l’endométriose : une étude japonaise suggère le rôle de la bactérie Fusobacterium (publié en septembre 2023)
Biocodex, Endométriose : une bactérie en cause ? (publié en octobre 2023 avec une mise à jour en mai 2024)
National Geographic, L’endométriose est-elle causée par une bactérie ?par Marie Zekri , publié en juillet 2023